Le Cromlech de M'zora,
joyau mégalithique du Maroc.
Auteur: Jonáš Tokarský
Traduction : Hakim Safadi
L'histoire du Maroc contient plusieurs couches, comme les champs en terrasses de la vallée de l'Ourika. Sous les couches de l'époque moderne (par exemple le Mausolée de feu S.M. Mohammed V à Rabat), du Moyen Âge (par exemple l’Université Al Quaraouiyine à Fès) et de l'Antiquité (Volubilis, Lixus, etc.), se cachent aussi des couches de l'Âge de Bronze et de la Pierre. À titre d’exemples, on peut citer les tombes à tumulus situées à proximité du village de Tagounite, ou les pétroglyphes ( gravures rupestres sur pierres préhistoriques) qui se trouvent dans les villages d'Aït Ouazik, Taghjijt ou Akka.
Pétroglyphes d'Aït Ouazik (Gravures rupestres sur pierres préhistoriques). Source : Wikipédia
Cependant, le plus beau témoin, et en même temps le plus mystérieux de ces temps anciens, reste sans aucun doute le cercle mégalithique (cromlech) du site archéologique de M'zora, situé à environ 15 km au Sud-Est de la ville d'Asilah, au Nord du Maroc. Alors que les monuments mégalithiques abondent sur les îles méditerranéennes voisines, et même en Espagne (sans parler des rangées de pierres du Carnac en France ou de Stonehenge en Angleterre), M'zora abrite le seul cromlech marocain connu de ce type, malgré l’existence d’autres cercles de pierres moins connus de Wadi Tifariti , dans le Sud du Maroc, qui ne peuvent égaler sa taille. Aujourd'hui, le cromlech de M'zora, d'un diamètre d'environ 55 mètres, est composé de 168 pierres d'une hauteur moyenne de 1,50 m. Toutes les pierres sont dominées par une stèle de pierre, élancée à une hauteur d’environ 6 m, appelée « El Outed », ce qui signifie en langue tchèque « épingle ». La hauteur est incontestablement impressionnante, car le plus haut menhir tchèque, nommé « le Berger Pétrifié près du village Klobuky, n'atteint que 3,50 m et les pierres qui forment le célèbre cercle à linteaux de Stonehenge, mesurent seulement 4 m de haut. L'ensemble du cromlech se dresse sur un monticule bas, d’environ 6 m de haut, que l'on appelle le « monticule artificiel ». C'est ainsi que le Général romain Quintus Sertorius l’avait appris des habitants locaux en l’an 82 avant J.C., comme l'a écrit l'historien antique Plutarque dans son livre « Biographies parallèles ». En effet, les autochtones avaient affirmé à Quintus Sertorius que le géant Antaios était enterré dans le monticule. Selon d'anciennes légendes grecques, le héros grec Héraclès l'avait tué alors qu'il se rendait au jardin des Hespérides, pour cueillir des pommes d'or. En réalité, les pommes d'or étaient des oranges, et ce jardin mythique, situé quelque part à l'Ouest, comme le racontaient les anciens Grecs, était très probablement le territoire du Maroc d'aujourd'hui. (C’est là un fait intéressant, et signalons au passage, que dans le journal officiel du Maroc, dénommé « Société Marocaine d'Archéologie et du Patrimoine », cet endroit est appelé le «Jardin des Hespérides»). Quintus Sertorius fit ouvrir le tumulus et la prétendue découverte d'un corps enterré, de 26 m de long, l'aurait tellement effrayé qu'il ordonna d'ajouter des offrandes de valeur au corps, et de recouvrir le tumulus.
La stèle en pierre « El Outed » s'élevant du côté ouest du cromlech de M'zora.
Un monticule brisé est visible en arrière-plan. Source : Wikipédia
Si l'on admet que cet épisode ne soit pas entièrement fictif, on devrait se poser la question de savoir ce que Quintus avait réellement découvert, car ce n'était peut-être pas Antaios, mais probablement le "géant".
Le Maroc est connu pour ses sites paléontologiques et, outre les trilobites de renommée mondiale, il possède également des fossiles de la faune mésozoïque, parmi lesquels on peut trouver de véritables géants, comme le Spinosaurus maroccanus ou Atlasaurus imelakei atteignant 18 mètres de long. Les 18 mètres évoqués sont évidemment inférieurs aux 26 mètres annoncés par Plutarque, mais un squelette éparpillé dans le sol gagne en longueur et, en plus, comme on le dit souvent « la peur a de grands yeux ».
Un squelette de dinosaure enterré dans un monticule comme des restes squelettiques d'un prétendu géant - ce serait unique au monde. En même temps, il ne s’agit pas là d’une idée complètement absurde, car après tout, comme l’avait mentionné l'écrivain Apollodore dans son œuvre datée un siècle avant J.C., qu'il y avait une tombe du cyclope Geraest à Athènes. Les légendes grecques sur les Cyclopes géants borgnes sont nées de la découverte de crânes d'éléphants pygmées disparus, qui vivaient sur les îles méditerranéennes au début du Quaternaire. La narine proéminente au milieu du crâne était considérée comme l'orbite d'un grand œil. La tombe athénienne n'a pas survécu, mais si elle existait et que les Athéniens auraient enterré les os fossiles d'un éléphant, pourquoi les Berbères de M'zora n'auraient-ils pas pu enterrer un dinosaure ?
Plus de 1900 ans se sont écoulés depuis l'époque du curieux Quinto Sertori jusqu'à ce que le baronnet anglais Sir Arthur de Capell Brooke, publie en 1831 son récit de voyage intitulé « Sketches in Spain and Morocco » (Sketches en Espagne et au Maroc). Après avoir appris l'existence d'un site préhistorique intéressant (« On m'a parlé d'un haut pilier, dont l'origine était inconnue, qui se dresserait dans les montagnes à environ trois jours de Tanger... ce pilier... se trouvait à un endroit appelé Beni Goffert, mentionné par Léon l'Africain dans sa description de l'Afrique"), il a décidé le visiter.
Pour preuve qu’il ne s’est pas déplacé inutilement, voici un résumé du chapitre y afférent, décrit dans le livre :
« Ici, des vestiges antiques sont dispersés partout sur le sol. Il s'agit principalement d'une colonne ou d'une aiguille en pierre qui, grâce à sa forme et à sa position élevée, est repérable à une distance considérable depuis le nord de la vallée. La colonne se dresse sur le bord ouest d'un grand monticule circulaire, d'une circonférence considérable, quasiment entourée de quatre-vingt-six pierres de différentes tailles et formes. Il est fort probable que tout le périmètre du monticule était autrefois bordé par ces pierres, et que celles qui manquaient du côté Est, ont été prises par les habitants locaux, pour clôturer leurs domiciles dans les parages. Seules quelques pierres mesurent trois ou quatre pieds de hauteur, et deux ou trois ont une forme conique. Du côté Sud du cercle, deux pierres dressées et arrondies se font face, hautes d'environ trois pieds, marquant ainsi l'entrée du monticule de ce côté, tout comme du côté Ouest l'entrée principale est marquée par le grand pilier déjà mentionné. Non loin de là, se trouve une pierre conique avec, sur les côtés, un étroit bord de marques en forme de croix, probablement anciennes et sculptées avec des outils. Comme je l'ai remarqué, l'une des pierres verticales arrondies formant l'entrée Sud, présente également des marquages similaires, mais moins réguliers et plus répartis sur la surface. La grande colonne elle-même, haute de seize pieds (soit environ 4,90 m), avec une circonférence d'environ neuf pieds (soit 2,70 m), est comprimée sur les côtés, de sorte qu'elle n'a pas vraiment de section transversale circulaire. Sa forme rappelle certaines pierres de Stonehenge et d’autres monuments celtiques. Aucune inscription, image ou indications faites à la main n’apparaissent sur la pierre, à l’exception du côté Est où se distingue, à environ trois pieds au-dessus du sol (soit presque 90 cm), un trou d'environ huit pouces de profondeur (environ 20 cm) et d'un diamètre de près d'un pied (soit environ 30 cm). Cependant, cette cavité semble être plus récente que la colonne, et a été probablement façonnée avec des couteaux et agrandie progressivement par les riverains qui croyaient que la colonne contenait un trésor (cette cavité est aujourd’hui encore visible sur la colonne).
À une distance d’un tiers de mile environ (presque 500 m) au Nord de la colonne, se trouvent quatre autres pierres, de formes irrégulières, partiellement enfouies dans le sol, dont la plus grande mesure environ huit pieds (soit presque 2,40 m). Non loin d’elles, se trouve une autre pierre conique de quatre pieds de haut (environ 1,20 m) qui se dresse obliquement sur le sol. À une centaine de mètres, au Nord du pilier, se trouvent également neuf autres pierres de différentes tailles. Non loin du pilier se trouve à l'Ouest, un énorme bloc de douze pieds de long (environ 3,60 m). À un quart de mile (environ 400 m), à l'Ouest du pilier et à proximité du village, se trouve un groupe de six autres pierres. Sur le plus grand d'entre eux, qui mesure environ 4,60 m de long, se trouvent des groupes de six, sept et neuf petits tas circulaires. Dans cet endroit, les grosses pierres soulèvent la même question que les pierres de bâtiments mégalithiques similaires dans mon pays natal, à savoir : comment ont-elles été transportées ? Bien que l'ère industrielle actuelle ait tendance à sous-estimer les capacités de nos ancêtres antiques, il est certain que les habitants actuels auraient du mal à déplacer les blocs de pierre disséminés autour de la colonne de « L'Outed ».
…
Il ne fait aucun doute que ce lieu est ancien. Les rumeurs que j'ai entendues en témoignent également, comme par exemple que le pharaon égyptien avait attaché son cheval au grand pilier, ou que la colombe libérée de l'arche de Noé lors du déluge mondial, s'est assise sur ce même pilier.
…
Mon modeste hôte m’affirme que le grand pilier s’est allongé, et qu'il y avait certainement une porte à côté, mais que personne n'a pu encore trouver. Il a ajouté quelque chose qui n'était peut-être pas une fiction complète, à savoir que le monticule était creux, et qu'un bâton avait été enfoncé dans un orifice particulier, pénétrant plusieurs pieds, sans pour autant toucher le fond ».
La stèle en pierre « El Outed » avec en arrière-plan un monticule intact, dessinée par
Arthur de Capell Brooke, lors de sa visite au cromlech de M'zora. Source : Wikipédia
Notons qu'en 1846, le géologue français Émilien Renou mentionne également le cromlech de M'zora. De même, Gustave-Marie Bleicher, un autre géologue français, avait décrit en détail ce lieu en 1875. En 1932, le moine franciscain Henry Koehler, examina également les pierres formant le cercle autour du tertre. Cependant, l’aspect du lieu, tel que vu et décrit par les auteurs mentionnés ci-dessus, est aujourd’hui déjà irréel.
En 1935, le chercheur espagnol César Luis de Montalban arrive sur les lieux et commence à effectuer des « fouilles archéologiques ». On ne sait pas s’il a découvert quelque chose à l’intérieur du monticule. Ce qui est sûr, c'est que le monticule a été endommagé de manière irréversible. Des sondes dans le monticule compact ont engendré son érosion rapide, et les deux larges fossés croisés qui le traversent, sont encore visibles, comme une vilaine cicatrice en forme de croix. Le monticule initial est aujourd’hui en grande partie disloqué. En revanche, cela aurait pu être pire, et nous ne pouvons que nous réjouir que le cromlech de M'zora ait échappé à l'attention d'experts comme le général Howard Vyse, qui a utilisé au XIXe siècle de la poudre à canon, lors de l'étude de la Grande Pyramide de Gizeh, en Égypte.
Dans les années 50 du XXe siècle, le site a été étudié par l'archéologue espagnol Miquel Tarradell, qui a découvert un deuxième cercle plus petit, composé de seize pierres à proximité du cercle principal. Ainsi, sur la base des poteries trouvées, Tarradell a daté la création du cromlech et du monticule au IIIe siècle avant J.C. Malgré la similitude visuelle du cromlech de M'zora avec les structures mégalithiques d'Europe, qui a conduit les précédents chercheurs à croire que le cromlech de M'zora et les mégalithes européens, ont été créés par des personnes du même cercle de civilisation, Tarradell a soutenu qu'il s'agissait là d'une structure créée par la population locale, qui s’est uniquement inspirée des structures mégalithiques européennes (et de la culture carthaginoise). Le monticule et le cercle de pierres qui l'entouraient étaient, selon Tarradell, la tombe d'un chef de tribu ou d'un Roi maure.
Dans les années 70 du XXe siècle, le site a été exploré par James Watt Mavor Jr., qui a trouvé un lien entre l'emplacement de certaines pierres et la direction des levers et couchers du soleil, les jours des solstices (évènements où le jour est le plus long ou le plus court dans une année) et des équinoxes (évènements où la durée du jour est presque égale à la durée de la nuit). Ainsi, la similitude visuelle du cromlech de M'zora avec les structures mégalithiques européennes était également perpétuée par la similitude de la destination supposée : le cromlech de M'zora aurait sans doute pu servir d'aide astronomique. L'hypothèse d'une parenté civilisationnelle de ses bâtisseurs avec les constructeurs d'édifices mégalithiques européens a ainsi été relancée.
Dans les mêmes années 70 du XXe siècle, le site a également été visité par John E. Palmer, qui avait décrit dans son article «Le cercle de pierres mégalithiques de M'zora, Maroc» (De megalitische steenkring van M'zora, Marokko), reproduit dans le magazine annuel néerlandais « Deus Ex Machina », numéro 3, paru en 1979, dont ci-après une description résumée :
« Au centre du cercle de pierres se trouve un monticule abrupt, dont la moitié a été déplacée par l'excavation, dévoilant de la terre orange. Les mégalithes sont gris-vert, parfois tachetés de mousse ou de lichen. J'entre dans le cercle et descends dans une fosse profonde, creusée au centre du monticule. En bas, à peu près au milieu, je trouve une pierre d'autel blanche, finement polie. A côté de ses deux cornes se trouvent deux rochers bruns, relativement petits, qui sortent du sol (l'état décrit a été conservé jusqu'à ce jour, mais des photographies plus anciennes prouvent que la pierre plate reposait à l'origine sur deux pierres plus petites, comme une table sur deux pieds). Une pierre similaire aux pierres brunes à côté, se trouve dans l’autre moitié du cercle. Ma boussole indique que le grand menhir et les deux bornes se trouvent sur la ligne Ouest-Est (l'état décrit a été conservé à ce jour).
À l’intérieur du cercle, Il y a moins de lumière et les côtés abrupts du monticule empêchent la lumière du soleil de pénétrer, même si une grande partie du monticule a déjà disparu. On ignore si cela a été causé par des archéologues incompétents, ou par des indigènes qui étaient à la recherche de trésors. N'est-il pas ironique de chercher un trésor au milieu du « trésor », c'est-à-dire dans le cercle lui-même ? Le reste de la colline fut à nouveau divisé en deux, créant une large vue sur la plus grande pierre dressée, un grand menhir semblable à une haute colonne, finement poli et modelé, se rétrécissant vers le sommet. Il mesure environ 20 pieds de haut et pèse probablement plusieurs centaines de tonnes, mais sa forme élégante donne l'impression qu'il est léger.
Sur un côté du cercle se trouve une sorte de muret, semblable à la structure de Stonehenge, des menhirs sur lesquels reposent des linteaux horizontaux, suffisamment larges pour que l'on puisse marcher dessus. Les assemblages se font aussi entre deux pierres formant un cercle, juste en face d'autres pierres situées à quelques mètres à l'extérieur du cercle. Ce groupe isolé de pierres dressées est emboité dans une enceinte rectangulaire de petites pierres brunes, semblables à celles formant le deuxième cercle, à environ un mètre du périmètre du cercle de pierres principal.
Le cercle de pierres principal lui-même mesure environ 105,94 yards (environ 96 m de largeur) ; on ne sait pas exactement ce que l'auteur a réellement mesuré, car le cromlech a un diamètre d'environ 55 mètres, et contient environ 200 grosses pierres debout). Le cercle est bordé à l’extérieur par des pierres disposées différemment, comme si l’ensemble du cercle principal était placé dans un cadre en pierre. La même disposition peut être observée dans un groupe isolé de pierres.
Je me tiens debout devant un grand menhir et regarde au loin une montagne bleue, visible à travers un immense trou dans la colline. À l'extérieur du cercle de pierres, à l'Ouest du menhir, se trouve une grosse pierre plantée dans le sol, qui pourrait servir de repère d'observation. J'aperçois d'autres enclos en pierre, de forme carrée, mais tous étaient assez dispersés sur le sol. Je me demande combien de pierres il y avait dans la période avant que le monticule ne soit excavé. L’existence du monticule serait-elle postérieure au cercle de pierres, ou s’agissait-il plutôt d’un simple tas de pierres, ou peut-être pouvait-il cacher une tombe ? Dans l'ensemble, cela me semble être une structure complexe. Les mégalithes eux-mêmes ont dû être amenés ici de très loin - ce sont pratiquement les seules grosses pierres dans un rayon de plusieurs kilomètres. Beaucoup se sont brisées au fil des années. Dans certaines pierres, on pouvait même voir des tous circulaires, probablement faits par des personnes qui voulaient les casser».
Il s'agit de savoir si les trous mentionnés sont d'une date plus récente. Ils pourraient également avoir été utilisés par des constructeurs pour utiliser des pierres, ou avoir un tout autre but. Cependant, la réalité est que le cromlech de M'zora a une composition complexe. Dans les pages de l'Encyclopédie berbère, fondée en 1984 sous l'égide de l'UNESCO par l'archéologue et anthropologue social français Gabriel Camps (qui partage ses visions avec Miquel Tarradell), on peut lire une description détaillée (ici résumée) :
« Ce monument est constitué d'un monticule presque circulaire, entouré de pierres. La base du monticule est constituée d’un muret de plusieurs couches de blocs de pierres rectangulaires, assemblés sans mortier (en 1952, au moment de la publication de Tarradell, le monticule mesurait 6 m de haut). Le cercle de pierres comprend 167 monolithes artificiels, grossièrement taillés et polis, de différentes dimensions, d’une hauteur moyenne de 1,5 m ; deux sont nettement plus hauts mesurant 4,20 m et près de 6 m. Les pierres sont soit circulaires, ovales ou rectangulaires avec des coins arrondis, la partie aigüe pointant vers le haut ; sur la surface de certaines pierres se trouvent des creux plus ou moins profonds. Un couloir aux pavés très soigneusement posés, traverse le centre du monticule » (Les rapports selon lesquels le monticule est creux, écrits par Capell Brooke, étaient apparemment véridiques). La reconstruction photogrammétrique (c'est-à-dire la détermination de la forme originale à partir de photographies au sol et aériennes), réalisée par A. Carrier-Guillomet, démontre la complexité considérable de l'ensemble de la structure.
On peut observer une deuxième limite de pierres, au moins partiellement parallèle à la première. Cette seconde limite s'étend vers l'Ouest et forme une sorte de bastion rectangulaire. Dans le prolongement de ce bastion, mais nettement séparée, se trouve une zone trapézoïdale aux murs très endommagés. (Actuellement, il ne reste de cette partie qu'un tas de pierres). Au Maghreb, ces bastions sont fréquents sur les tumulus dits « antennes », mais ils sont toujours orientés vers l'Est. Sans doute, il s'agit là d'un autel extérieur, utilisé à des fins religieuses. Enfin, au Nord-Ouest, loin du tertre, se trouve une plate-forme rectangulaire délimitée par des murs entourant un tas de pierres brisées. Cette structure en fit-elle partie ? Et est-elle liée au grand monticule ? Si c’est le cas, cela dupliquerait le plateau trapézoïdal occidental.
Cette structure, très complexe, contient divers éléments : un cercle de pierres, un trottoir, un mur et d'autres plates-formes. Il est très probable que tous ces éléments n'aient pas été créés en même temps, et que la construction se soit déroulée en plusieurs étapes. Au Maghreb, c'est un monument tout à fait exceptionnel, tant par sa composition que par ses dimensions. Cette structure n’est cependant pas isolée, car il existe plusieurs grosses buttes dans la région. La datation de la création de ce monument est difficile. Selon Tarradell, il s'agit d'un édifice relativement tardif, datant probablement du IIIe siècle avant J.C. au plus tard, avec des influences carthaginoises, couplées d’une affinité avec l'Europe atlantique et les traditions locales. De nombreuses questions restent en suspens et des recherches plus poussées seront difficiles à entreprendre, notamment en raison de la détérioration progressive du monument, survenue au fil du temps.»
La dernière phrase est malheureusement véridique et pessimiste. L'état actuel du monument est lamentable, et une comparaison des photographies prises au cours des quatre-vingt-dix dernières années, montre que la destruction du lieu progresse à un rythme considérable. Par conséquent, si vous en avez l’envie et l'opportunité, rendez-vous dans ce lieu unique, qui prouve l’existence d'un ancien lien culturel entre le Maroc et l'Europe, car dans quelques années, il n'y aura peut-être plus rien à admirer.
ČMSPS - 12.10.2024